Le bonheur est dans le pré

*Source de l’image en en-tête: https://www.culture-russe.com/post/habitations-traditionnelles-en-russie

J’ai reçu récemment une demande plutôt spéciale de celle qui édite l’Info-courriel que vous lisez présentement, Isabelle. Elle voulait tout simplement savoir quelles étaient les deux directrices d’échange lors du séjour à Louhansk, en Ukraine, et Korolev en Russie en 2005. Ma tête a fait un long demi-tour pour retrouver mon chemin si lointain, imaginez 20 ans déjà que ces événements spéciaux ont eu lieu dans le club de la Force de l’amitié.

Ce voyage vers ces contrées inconnues était pour nous plutôt une excursion, une aventure, que même le Club Aventure n’a jamais organisé je pense. Un petit détachement de 12 volontaires, dont 2 du club de Sherbrooke, et le fils, ado, d’une participante. Nous sommes les seuls deux intrépides qui sont encore dans la Force de l’amitié, Janine et moi-même. Toute cette histoire m’est revenue en flashback comme dans un film, chaque rencontre, chaque lieu, les visages inoubliables. Quand je regarde ce film, je peux dire que c’était les belles années où on croyait en un avenir meilleur. Le monde s’ouvrait partout, en ex-URSS, en Asie aussi. Partout nous avions été accueillis comme si nous étions de vieux amis. On croyait en un avenir meilleur. Vingt ans plus tard, on ne sait plus comment réagir. Louhansk sacrifiée à cause de la guerre, la Russie au banc des accusées par la communauté internationale, et maintenant les amis de toujours en Amérique du Nord qui montrent leurs crocs. Mais pourtant les gens n’ont pas changé, qu’est-ce qui s’est donc passé?

Je vous raconte une journée dans cette tournée très particulière: Nous sommes mardi, 16 août. Notre séjour à Louhansk est terminé. Lever à 6 h 30. Hop, nous prenons l’avion à Donetsk pour aller à Moscou. Moscou congestionné à l’heure de pointe, comme Montréal, comme toutes les grandes villes. Nous rencontrons ceux qui seront nos hôtes pendant une semaine. Aller à leur appart en ville, pas question. Vite la campagne, direction la datcha, à une heure ou deux de Moscou si je me souviens. Quel dépaysement, quelle surprise. Nous voici dans une petite maison d’été toute simple, thé sur la terrasse, préparé dans un samovar superbe qui trône sur une petite table. C’est la détente totale après une longue journée, et déjà on se sent en bonne compagnie, avec des amis. Notre regard se pose sur le jardin, plein de légumes et de fleurs entremêlés, nous sommes au mois d’août, tout est beau, calme, on ne peut pas plus convivial. Nos hôtes nous promettent que nous reviendrons au moins un soir pour y déguster un bbq et dormir dans la datcha. Dormir dans une datcha, c’est très étrange, parce qu’il faut grimper une petite échelle pour s’allonger dans ce qui est un petit entre-toit, aussi petit qu’une tente pour deux, qui a été bien chauffé par le soleil durant le jour.

On comprenait bien que ce n’était pas tous les Moscovites qui pouvaient profiter d’une datcha pas trop loin de la ville. J’avais fait mon enquête personnelle à ce sujet, directement auprès de nos hôtes. Ils nous avaient expliqué très honnêtement que les petits terrains (400 à 600 mètres carrés) étaient donnés à des personnes près du système politique, aussi à des gens qui exerçaient une profession ou qui avaient fait des travaux particuliers pour l’État. Dans le cas de nos hôtes, tous les deux avaient oeuvré comme ingénieurs pour l’agence spatiale soviétique. Au temps des grandes avancées dans le domaine de l’espace, le premier satellite, le premier homme en orbite, la première station spatiale Mir mise en orbite en 1986, c’était l’époque des prouesses technologiques. Savez-vous que Mir en russe signifie Paix? Malheureusement la paix actuellement dans cette région du monde n’est qu’un mirage, si vous me suivez, Mir comme dans Mirage…! Et mon coeur pleure, comme si j’y étais. Ça s’est passé en 2005 il y a 20 ans, et une partie de mon coeur y est resté. 

Notre journal de ce périple fait 34 pages bien remplies de textes, avec quelques petites photos. Onze auteurs seulement. Il est publié sur le site de FAM. C’est un livre, c’est une ode à l’amitié, la camaraderie, qui bouscule les préjugés de toutes sortes. Aujourd’hui, nous avons le sentiment que nous retournons à l’ère des grands dinosaures, qui mangera qui. Je lis présentement Que notre joie demeure, de Kev Lambert. Ceci étant cela…

Pour vous détendre un peu avant de retourner à vos mauvaises nouvelles quotidiennes qui vous arrivent de partout, je vous pose cette petite question: Sachant que le bonheur est dans le pré, êtes-vous datcha ou isba?